La versione e la traduzione della vincitrice
SUPERSTITIO TOLLENDA, NON RELIGIO
Si neque deus est effector somniorum neque naturae societas ulla cum
somniis, neque observatione inveniri potuit scientia, effectum est ut
nihil prorsus somniis tribuendum sit, praesertim cum illi ipsi, qui ea
vident, nihil divinent, ii qui interpretantur coniecturam adhibeant,
non naturam, casus autem innumerabilibus paene saeculis in omnibus
plura mirabilia quam in somniorum visis effecerit, neque coniectura,
quae in varias partes duci possit, non numquam etiam in contrarias,
quicquam sit incertius.
Explodatur igitur haec quoque somniorum divinatio pariter cum ceteris.
Nam, ut vere loquamur, superstitio fusa per gentes oppressit omnium
fere animos atque hominum imbecillitatem occupavit.
Quod et in iis libris dictum est, qui sunt de natura deorum, et hac
disputatione id maxume egimus. Multum enim et nobismet ipsis et nostris
profuturi videbamur si eam funditus sustulissemus. Nec vero (id enim
diligenter intellegi volo) superstitione tollenda religio tollitur.
Nam et maiorum instituta tueri sacris caerimoniisque retinendis
sapientis est, et esse praestantem aliquam aeternamque naturam, et eam
suspiciendam admirandamque hominum generi pulchritudo mundi ordoque
rerum caelestium cogit confiteri.
Quam ob rem, ut religio propaganda etiam est quae est iuncta cum
cognitione naturae, sic superstitionis stirpes omnes eligendae. Instat
enim et urget et, quo te cumque verteris, persequitur.
M. Tullius Cicero
Il faut se débarrasser de la superstition, non pas de la religion Puisque d'une part la divinité n'est le créateur des songes, puisque d'autre part il n'y a aucune association entre la nature et les songes, et que les connaissances ence domaine n'ont pas pu être établies par l'observation, il en résulte qu'il ne faut absolument rien attribuer aux songes, d'autant plus que ceux-là mêmes qui les voient ne prophétisent rienet que ceux qui les interprètent ont recours à un raisonnement conjectural et non pas à la nature ; en outre, le hasard a produit, dans toutes les situations, davantage d'évènements étonnants au cours de générations presque innombrables que dans les visions des songes, et rien ne saurait être plus incertain que la conjecture, qui peut être menée dans diverses directions parfois mêmes contraires. Que cette divination des songes soit donc également désapprouvée, en même temps que toutes les autres formes de divination! En effet, pour parler franchement, la superstition répandue à travers les peuples accable l'âme de la quasi totalité des hommes et se rend maître de leur faiblesse. Cela, je l'ai dit aussi dans ces livres qui parlent de la nature des dieux, et nous en avons débattu très longuement dans cette discussion. Effectivement, il nous semblait qu'il s'avérerait très utile, pour nous-mêmes aussi que pour les nôtres, de nous débarrasser radicalement de la superstition. Et de fait (en effet je veux que ceci soit compris soigneusement), on ne supprime pas la religion en se débarrassant de la superstition. Car c'est le devoir de l'homme sage que de maintenir les institutions de ses ancêtres en conservant les rites et les cérémonies sacrées ; de plus, la beauté du monde et l'arrangement des corps célestes nous contraignent à avouer qu'il existe une nature supérieure et éternelle, et que le genre humain se doit de la contempler et de l'admirer.
C'est pourquoi, de même qu'il faut farder et même propager la religion qui est liée à l'étude de la nature, de même il faut arracher toutes les racines de la superstition. En effet, cette dernière te menace et t'oppresse et, où que tu diriges tes pas, elle te suit obstinément.
COMMENTAIRE
Dans
son ouvrage intitulé De divinatione dont ce passage est tiré, Cicéron
condamne de façon rationnelle et catégorique toutes les formes de
divination.
Il s'attache ici tout particulièrement à la
superstition ; la base – ou, pour reprendre le terme de Cicéron – les
racines de la religion romaine : en effet, incapables d'expliquer
certaines coïncidences, les Romains ont peu établi une longue liste de
rites, et se sont acharnés à répéter les mêmes gestes de générations en
générations, de peur de susciter le courroux divin en altérant ne
serait-ce qu'un infime détail.
Il n'est donc pas tout à fait correct de dire que la superstition fait
partie intégrante de la religion romaine : elle en est bien plus le
fondement même.
D'ailleurs, le mot religio signifie d'abord « observation scrupuleuse
des rites établis ». Or, Cicéron fait ici une nette différence entre
religion et superstition.
Le titre du passage l'indique déjà : Cicéron n'a pas l'intention de
supprimer la religion, mais seulement la superstition. Comment donc,
puisque les deux sont intimement liées ? Cicéron n'a jamais prétendu
être athée ; au contraire, il admet l'exstemce d'une « nature
supérieure et éternelle ».
Mais, selon lui, cette « nature supérieure » doit être « contemplée et
admirée », et non pas craint. Or, la superstition établit précisément
une relation de crainte entre l'homme et la divinité ; c'est pourquoi,
selon les termes de Cicéron, l'humanité est oppressée, accablée et
poursuivie par la superstition, par la peur de susciter la colère
divine et – surtout – d'étendre cette colère à la cité entière.
C'est cet aspect que Cicéron veut supprimer, afin de faire de la religion une institution en quelque sorte plus humaine.
On voit ici transparaître le grand humanisme ce que le latin appelle
humanitas - de Cicéron : soucieux du bien-être de ses concitoyens, il
désire les libérer du terrible joug de la superstition qui leur ravi
leur liberté première.
Son plaidoyer pour la liberté touche le lecteur romain qui s'y
reconnaît : la dernière phase du texte, avec une forme à la deuxième
personne du singulier, s'adresse directement au lecteur qui ne peut que
hocher la tête devant l'affirmation de Cicéron.
Un certain conservatisme de la part de Cicéron se traduit également
dans ce texte, quand il parle des institutions des ancêtres.
Son but n'est pas d'ebranler la religion romaine de fond en comble
mais, comme nous l'avons dit, de la délivrer de ses aspects négatifs ;
de la même manière, Cicéron n'a jamais eu des tendances
révolutionnaires en matières de politique.
Il part toujours du point de vue qu'un remède pourrait se révéler pire
que le mal en soi. Mais, s'il faut conserver les istitutions des
ancêtres, c'est sans retenir l'aspect superstitieux. Signalons que le
mos, le respect de la coutume, est une des quatre grandes vertus
romaines qui forment la mentalité du peuple et mènent à la « droite
raison » .
La religion romaine est d'abord politique, dans le sens où le respect
des mêmes rites fonde la cohésion du peuple : la religion est donc un
outil pratique pour la santé interne de la république. Supprimer la
religion reviendrait à disloquer le peuple romain, et Cicéron en est
bien conscient.
Et pourtant, dans son humanisme infini, il désire dégager l'homme d'une
charge obsessionnelle et inutile : la crainte superstitieuse de la
nature divine